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Les miroirs aveugles

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LA PRESSE, MONTRÉAL, SAMEDI 12 FÉVRIER 2000

CINÉMA

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LES MIROIRS AVEUGLES

Solitude

interactive

JEAN-CHRISTOPHE LAURENCE

Tout le monde les connaît, plusieurs les utilisent, mais bien peu se sont penchés sur le phénomène.

Avec Les Miroirs aveugles, le cinéaste Jean Tessuer brosse des portraits d'hommes et de femmes qui recherchent l'amour par l'intermédiaire des services téléphoniques et de l'Internet.

Séduction virtuelle, quête de l'âme soeur, fantasmes à la carte..., à l'heure du "zapping relationnel", l'industrie de la solitude n'a jamais été aussi florissante. Ce long métrage documentaire met en lumière cette nouvelle réalité où la difficulté de faire des rencontres est compensée par la technologie, où l'artificiel prend le pas sur l'essentiel.

Évelyne y a trouvé la passion et le "thrill" du danger. Accro, Charles ne pouvait plus s'en passer. Idem pour Sylvain qui a dépensé jusqu'à 900.$ en un mois pour trouver l'âme soeur. Luc a bouclé ses fins de mois comme opérateur d'une ligne de conversation érotiques gaies. Luce, prof de français, y a cassé quelques rêves : de l'image idéalisée au premier face-à-face, la réalité peut être décevante. Stéphane a rencontré quelques filles par l'intermédiaire des agences téléphoniques, mais s'en tient désormais à des amitiés virtuelles.

Tous se confient tour à tour, expliquent leurs motivations, la compulsion et leur dépendance devant ce commerce de relations humaines. Franchise des témoignages, autocritique, aveux de désillusions : un voile se lève sur ces réseaux de solitude interactive où l'anonymat et l'amour-télécommande tiennent le haut du pavé.

Dans ce film dominé par le "human interest", on regrette toutefois que Tessier n'esquisse pas un portrait plus global de la situation. On veut savoir où a commencé cette industrie en expansion, qui la gère, combien elle génère par année, son nombre d'utilisateurs. Bref, tout ce qui permettrait de mieux mesurer l'ampleur du phénomène.

Le cinéaste Jean Tessier, ardent défenseur du long métrage documentaire, met en lumière dans Les Miroirs aveugles la quête amoureuse par le truchement des services téléphoniques et d'Internet.

LMA_Evelyne_Téléphone

Une porte s'ouvre en revanche sur l'apparition des nouvelles technologies, de plus en plus exploitées. Des systèmes de rencontre par Internet jusqu'au cybersexe, il n'y a qu'un pas... qu'on franchira vraisemblablement dans un avenir rapproché, poussant à l'exrême cette notion d'amour artificiel sans danger ni contraintes, où on peut se "loguer" sans s'engager et se débrancher quand ça ne clique plus.

Réalisateur, producteur, membre fondateur de Spirafilm et de Filmovie, ardent défenseur du long métrage documentaire, Jean Tessier signe un film de facture classique, qui révèle les symptômes d'une société déstabilisée, en pleine période de mutation. Une pertinente remise en question, alors qu'on se fascine de plus en plus pour l'émergence d'une communauté virtuelle et de moins en moins pour ses effets pervers dans la communauté réelle.

LES MIROIRS AVEUGLES, Long métrage documentaire de Jean Tessier, 108 minutes. À Ex-Centris, jusqu'au 24 février.

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